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HISTOIRE DE FRANCE

et contributions, et qui, pour cette raison aimaient mieux payer à l’église de Reims qu’au roi. Le bienheureux saint Remi se mit donc en chemin, et l’on voit encore aujourd’hui les traces de son passage et les limites qu’il marqua. Chemin faisant, un meunier repoussa le saint homme, ne voulant pas que son moulin fût renfermé dans l’enceinte. « Mon ami, lui dit avec douceur l’homme de Dieu, ne trouve pas mauvais que nous possédions ensemble ce moulin. » Celui-ci l’ayant refusé de nouveau, aussitôt la roue du moulin se mit à tourner à rebours ; lors le meunier de courir après saint Remi et de s’écrier : « Viens, serviteur de Dieu, et possédons ensemble ce moulin. — Non, répondit le saint, il ne sera ni à toi ni à moi. » La terre se déroba aussitôt, et un tel abîme s’ouvrit, que jamais depuis il n’a été possible d’y établir un moulin.

« De même encore, le saint passant auprès d’un petit bois, ceux à qui il appartenait l’empêchaient de le comprendre dans son domaine : « Eh bien ! dit-il, que jamais feuille ne vole ni branche ne tombe de ce bois dans mon clos. » Ce qui a été en effet observé par la volonté de Dieu, tant que le bois a duré, quoiqu’il fût tout à fait joignant et contigu.

« De là, continuant son chemin, il arriva à Chavignon, qu’il voulut aussi enclore, mais les habitants l’en empêchèrent. Tantôt repoussé et tantôt revenant, mais toujours égal et paisible, il marchait toujours, traçant les limites telles qu’elles existent encore. À la fin, se voyant repoussé tout à fait, on rapporte qu’il