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HISTOIRE DE FRANCE

il y fut tué, sans doute par les amis d’Alpaïde. Carl lui-même se signala comme ennemi de l’Église. Son surnom païen de Marteau me ferait volontiers douter s’il était chrétien. On sait que le marteau est l’attribut de Thor, le signe de l’association païenne, celui de la propriété, de la conquête barbare. Cette circonstance expliquerait comment un empire, épuisé sous les règnes précédents, fournit tout à coup tant de soldats et contre les Saxons et contre les Sarrasins. Ces mêmes hommes, attirés dans les armées de Carl par l’appât des biens de l’Église qu’il leur prodigua, purent adopter peu à peu la croyance de leur nouvelle patrie, et préparèrent une génération de soldats pour Pepin-le-Bref et Charlemagne. Dans cette famille tout ecclésiastique des Carlovingiens, le bâtard, le proscrit Carl, ou Charles-Martel, offre une physionomie à part et très peu chrétienne[1].

D’abord les Neustriens, battus par lui à Vincy, près de Cambrai, appelèrent à leur aide les Aquitains, qui, depuis la dissolution de l’empire des Francs, formaient une puissance redoutable. Eudes, leur duc, s’avança jusqu’à Soissons, s’unit aux Neustriens, qui n’en furent pas moins vaincus. Peut-être eût-il continué la guerre avec avantage, mais il avait alors un ennemi derrière lui. Les Sarrasins, maîtres de l’Espagne, s’étaient emparés du Languedoc. De la ville romaine et gothique de Narbonne, occupée par eux, leur innombrable cavalerie se lançait audacieusement vers

  1. App. 109.