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Page:Michelet - OC, Histoire de France, t. 16.djvu/17

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essentiel qui devait influer sur le jugement définitif que l’histoire porterait sur eux [1].

Les lettres publiées par Arneth montrent qu’ils furent très avertis. Ils surent que le secours demandé coûterait à la France ses meilleures frontières, les barrières qui la gardent, et ne purent pas douter qu’ainsi démantelée et à discrétion, elle ne fût en péril pour l’intérieur, le corps même de la monarchie. L’ambassadeur d’Autriche les avertit expressément « que les puissances ne feraient rien pour rien », se payeraient de l’Alsace, de nos Alpes et de la Navarre (7 mars 91, p. 147-149). Malgré cette communication, la reine réclama de nouveau l’invasion (20 avril). Enfin, la Coalition s’étant armée et complétée, la reine révéla à l’Autriche le plan de Dumouriez et le point que devait attaquer La Fayette : « Voilà, dit-elle, le résultat du conseil d’hier », conseil tenu devant le roi et dont elle connut par lui le résultat pour en informer l’ennemi (26 mars 92, Arneth, 259).

Tout ce que les Campan et autres amis de la reine, pour excuser ses torts, nous disent de la froideur du roi, est mis à néant par ces lettres. Il la suspectait

  1. L’ignorance où l’on était explique l’indulgence des historiens, de MM. Thiers, Mignet, Droz, Louis Blanc, Lanfrey, Carnot, Ternaux, Quinet. — C’est en juin 1865 que M. Geffroy, le premier en France, fit connaître la publication d’Arneth, apprécia les vraies et les fausses lettres du roi et de la reine avec une ingénieuse et pénétrante critique. — Voir l’appendice de son livre, Gustave III et la cour de France, si riche de faits nouveaux sur l’histoire de ce temps.