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LOUIS-LE-JEUNE ET HENRI II (PLANTAGENET)

des malheureux qu’ils avaient abandonnés en Cilicie, Louis VII ne voulut rien entreprendre pour le prince d’Antioche, Raymond de Poitiers, oncle de sa femme Éléonore. C’était le plus bel homme du temps, et sa nièce semblait trop bien avec lui. Louis craignit qu’il ne voulût l’y retenir, partit brusquement d’Antioche, et se rendit à la terre sainte. Il n’y fit rien de grand. Conrad vint l’y retrouver. Leur rivalité leur fit manquer le siège de Damas, qu’ils avaient entrepris. Ils retournèrent honteusement en Europe, et le bruit courut que Louis, pris un instant par les vaisseaux des Grecs, n’avait été délivré que par la rencontre d’une flotte des Normands de Sicile.

C’était une triste chose qu’un pareil retour et une grande dérision. Qu’étaient devenus ces milliers de chrétiens abandonnés, livrés aux infidèles ? Tant de légèreté et de dureté en même temps ! Tous les barons étaient coupables, mais la honte fut pour le roi. Il porta le péché à lui seul. Pendant la croisade, la fière et violente Éléonore avait montré le cas qu’elle faisait d’un tel époux. Elle avait déclaré dès Antioche qu’elle ne pouvait demeurer la femme d’un homme dont elle était parente, que d’ailleurs elle ne voulait pas d’un moine pour mari[1]. Elle aimait, dit-on, Raymond d’Antioche ; selon d’autres, un bel esclave sarrasin. On disait qu’elle avait reçu des présents du chef des infidèles. Au retour, elle demanda le divorce au concile de Beaugency. Louis se soumit au jugement du concile, et

  1. « Se monacho, non regi nupsisse. »