CHAPITRE VI
La face du monde était sombre à la fin du douzième siècle. L’ordre ancien était en péril, et le nouveau n’avait pas commencé. Ce n’était plus la lutte matérielle du pape et de l’empereur, se chassant alternativement de Rome, comme au temps d’Henri IV et de Grégoire VII. Au onzième siècle, le mal était à la superficie, en 1200 au cœur. Un mal profond, terrible, travaillait le christianisme. Qu’il eût voulu revenir à la querelle des investitures, et n’avoir à combattre que sur la question du bâton droit ou courbé ! Alexandre III lui-même, le chef de la ligue lombarde, n’avait osé appuyer Thomas Becket ; il avait défendu les libertés italiennes, et trahi celle d’Angleterre. Ainsi l’Église allait s’isoler du grand mouvement du monde. Au lieu de le guider et le devancer, comme elle avait fait jusqu’alors, elle s’efforçait de l’immobiliser, ce mouve-