Page:Michelet - OC, Histoire de France, t. 2.djvu/376

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
366
HISTOIRE DE FRANCE

nique furent autorisés par le pape à s’associer aux travaux des Cisterciens. Ce Dominique, ce terrible fondateur de l’inquisition, était un noble Castillan[1]. Personne n’eut plus que lui le don des larmes qui s’allie si souvent au fanatisme[2]. Lorsqu’il étudiait à Palencia, une grande famine régnant dans la ville, il vendit tout, et jusqu’à ses livres, pour secourir les pauvres.

L’évêque d’Osma venait de réformer son chapitre d’après la règle de saint Augustin ; Dominique y entra. Plusieurs missions l’ayant conduit en France, à la suite de l’évêque d’Osma, il vit avec une pitié profonde tant d’âmes qui se perdaient chaque jour. Il y avait tel château, en Languedoc, où l’on n’avait pas communié depuis trente ans[3]. Les petits enfants mouraient sans baptême. « La nuit d’ignorance couvrait ce pays, et les bêtes de la forêt du Diable s’y promenaient librement[4]. »

D’abord, l’évêque d’Osma, sachant que la pauvre noblesse confiait l’éducation de ses filles aux hérétiques, fonda un monastère près Montréal, pour les soustraire à ce danger. Saint Dominique donna tout ce qu’il possédait ; et entendant dire à une femme que

  1. « Sa prière était si ardente qu’il en devenait comme insensé. Une nuit qu’il priait devant l’autel, le diable, pour le troubler, jeta du haut du toit une énorme pierre qui tomba à grand bruit dans l’église, et toucha, dans sa chute, le capuchon du saint ; il ne bougea point, et le diable s’enfuit en hurlant. » (Acta S. Dominici.)
  2. Lorsqu’on recueillit les témoignages pour la canonisation de saint Dominique, un moine déposa qu’il l’avait souvent vu pendant la messe baigné de larmes, qui lui coulaient en si grande abondance sur le visage qu’une goutte n’attendait pas l’autre.
  3. Pierre de Vaux-Cernay.
  4. Guill. de Pod. Laur.