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LOUIS IX

Cinq cents templiers y étaient restés ; c’était tout ce que l’ordre avait alors de chevaliers à la terre sainte ; puis les Mongols avaient pris Jérusalem abandonnée de ses habitants ; ces barbares, par un jeu perfide, mirent partent des croix sur les murs ; les habitants, trop crédules, revinrent et furent massacrés.

Saint Louis était malade, alité, et presque mourant, quand ces tristes nouvelles parvinrent en Europe. Il était si mal qu’on désespérait de sa vie, et déjà une des dames qui le gardaient voulait lui jeter le drap sur le visage, croyant qu’il avait passé. Dès qu’il alla un peu mieux, au grand étonnement de ceux qui l’entouraient, il fit mettre la croix rouge sur son lit et sur ses vêtements. Sa mère eût autant aimé le voir mort. Il promettait, lui faible et mourant, d’aller si loin, outre-mer, sous un climat meurtrier, donner son sang et celui des siens dans cette inutile guerre qu’on poursuivait depuis plus d’un siècle. Sa mère, les prêtres eux-mêmes le pressaient d’y renoncer. Il fut inflexible ; cette idée qu’on lui croyait si fatale fut, selon toute apparence, ce qui le sauva ; il espéra, il voulut vivre, et vécut en effet. Dès qu’il fut convalescent, il appela sa mère, l’évêque de Paris, et leur dit : « Puisque vous croyez que je n’étais pas parfaitement en moi-même quand j’ai prononcé mes vœux, voilà ma croix que j’arrache de mes épaules, je vous la rends… Mais à présent, continua-t-il, vous ne pouvez nier que je ne sois dans la pleine jouissance de toutes mes facultés ; rendez-moi donc ma croix ; car celui qui sait toute chose sait aussi qu’aucun aliment n’entrera dans ma