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APPENDICE

nombre. Ils assassinèrent les courriers du pape, écrivirent des lettres menaçantes aux ecclésiastiques étrangers, etc. Au bout de huit mois, le roi interposa son autorité. Twinge se rendit à Rome, où il gagna son procès, et conféra le bénéfice, etc. Lingard, III, 161.


132 — page 447L’empereur Frédéric II

« Frédéric, dit Villani (l. VI, c. i), fut un homme doué d’une grande valeur et de rares talents ; il dut sa sagesse autant aux études qu’à sa prudence naturelle. Versé en toute chose, il parlait la langue latine, notre langue vulgaire (l’italien), l’allemand, le français, le grec et l’arabe. Abondant en vertus, il était généreux, et à ses dons il joignait encore la courtoisie ; guerrier vaillant et sage, il fut aussi fort redouté. Mais il fut dissolu dans la recherche des plaisirs ; il avait un grand nombre de concubines, selon l’usage des Sarrasins ; comme eux, il était servi par des mameluks ; il s’abandonnait à tous les plaisirs des sens, et menait une vie épicurienne, n’estimant pas qu’aucune autre vie dût venir après celle-ci… Aussi ce fut la raison principale pour laquelle il devint l’ennemi de la sainte Église. »

« Frédéric, dit Nicolas de Jamsila (Hist. Conradi et Manfredi, t. VIII, p. 495), fut un homme d’un grand cœur ; mais la sagesse, qui ne fut pas moins grande en lui, tempérait sa magnanimité, en sorte qu’une passion impétueuse ne déterminait jamais ses actions, mais qu’il procédait toujours avec la maturité de la raison… Il était zélé pour la philosophie ; il la cultiva pour lui-même, il la répandit dans ses États. Avant les temps heureux de son règne, on n’aurait trouvé en Sicile que peu ou point de gens de lettres ; mais l’empereur ouvrit dans son royaume des écoles pour les arts libéraux et pour toutes les sciences ; il appela des professeurs de différentes parties du monde, et leur offrit des récompenses libérales. Il ne se contenta pas de leur accorder un salaire ; il prit sur son propre trésor de quoi payer une pension aux écoliers les plus pauvres, afin que dans toutes les conditions les hommes ne fussent point écartés par l’indigence de l’étude de la philosophie. Il donna lui-même une preuve de ses talents littéraires, qu’il avait surtout dirigés vers l’histoire naturelle, en écrivant un livre sur la nature et le soin des oiseaux, où l’on peut voir combien l’empereur avait fait de progrès dans la philosophie. Il chérissait la justice, et la respectait si fort, qu’il était permis à tout homme de plaider contre l’empereur, sans que le rang du monarque lui donnât aucune faveur auprès des tribunaux, ou qu’aucun avocat hésitât à se charger contre lui de la