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HISTOIRE DE FRANCE

ducs, comtes et barons, dans toutes les parties du monde.

Si le grand maître se portait ainsi pour défenseur de l’ordre, il allait prêter une grande force à la défense et sans doute compromettre le roi. Les commissaires l’engagèrent à délibérer mûrement. Ils lui firent lire sa déposition devant les cardinaux. Cette déposition n’émanait pas directement de lui-même ; par pudeur ou pour tout autre motif, il avait renvoyé les cardinaux à un frère servant qu’il chargeait de parler pour lui. Mais lorsqu’il fut devant la commission, et que les gens d’Église lui lurent à haute voix ces tristes aveux, le vieux chevalier ne put entendre de sang-froid de telles choses dites en face. Il fit le signe de la croix, et dit que si les seigneurs commissaires du pape[1] eussent été autres personnes, il aurait eu quelque chose à leur dire. Les commissaires répondirent qu’ils n’étaient pas gens à relever un gage de bataille. — « Ce n’est pas là ce que j’entends, dit le grand maître, mais plût à Dieu qu’en tel cas on observât contre les pervers la coutume des Sarrasins et des Tartares ; ils leur tranchent la tête ou les coupent par le milieu. »

Cette réponse fit sortir les commissaires de leur douceur ordinaire. Ils répondirent avec une froide dureté : « Ceux que l’Église trouve hérétiques, elle les juge hérétiques, et abandonne les obstinés au tribunal séculier. »

L’homme de Philippe-le-Bel, Plasian, assistait à

  1. M. Raynouard dit les cardinaux, mais à tort.