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SUITE DU RÈGNE DE PHILIPPE-LE-BEL

mourant, il laisse à la royauté qui le frappe ses instruments de puissance, au peuple qui le maudit des institutions d’ordre et de paix.

Peu d’années s’étaient écoulées que le corps de Marigni fut respectueusement descendu de Montfaucon et reçut la sépulture chrétienne. Louis-Hutin légua dix mille livres aux fils de Marigni. Charles-de-Valois, dans sa dernière maladie, crut devoir, pour le bien de son âme, réhabiliter sa victime. Il fit distribuer de grandes aumônes, en recommandant de dire aux pauvres : « Priez Dieu pour monseigneur Enguerrand de Marigni, et pour monseigneur Charles-de-Valois. »

La meilleure vengeance de Marigni, c’est que la royauté, si forte sous lui, tomba après lui dans la plus déplorable faiblesse. Louis-Hutin, ayant besoin d’argent pour la guerre de Flandre, traita comme d’égal à égal avec la ville de Paris. Les nobles de Champagne et de Picardie se hâtèrent de profiter du droit de guerre privée qu’ils venaient de reconquérir, et firent la guerre à la comtesse d’Artois, sans s’inquiéter du jugement du roi qui lui avait adjugé ce fief. Tous les barons s’étaient remis à battre monnaie. Charles-de-Valois, l’oncle du roi, leur en donnait l’exemple. Mais au lieu d’en frapper seulement pour leurs terres, conformément aux ordonnances de Philippe-le-Hardi et Philippe-le-Bel, ils faisaient la fausse monnaie en grand et lui donnaient cours par tout le royaume.

Il fallut bien alors que le roi se réveillât et revînt au gouvernement de Marigni et de Philippe-le-Bel. Il