morts ; il fit la revue du monde fini, le classa, le jugea. Le moyen âge, comme l’antiquité, comparut devant lui. Rien ne lui fut caché. Le mot du sanctuaire fut dit et profané. Le sceau fut enlevé, brisé : on ne l’a pas retrouvé depuis. Le moyen âge avait vécu ; la vie est un mystère, qui périt lorsqu’il achève de se révéler. La révélation, ce fut la Divina Commedia, la cathédrale de Cologne, les peintures du Campo Santo de Pise. L’art vient ainsi terminer, fermer une civilisation, la couronner, la mettre glorieusement au tombeau.
N’accusons pas le pape, si cet octogénaire, vieil avocat, et nourri dans les ruses et les plus prosaïques intrigues[1], se laissa gagner lui-même à la grandeur, à la poésie de ce moment, où il vit le genre humain réuni à Rome et à genoux devant lui… Il est d’ailleurs une sombre puissance de vertige dans cette ville tragique. Les souverains de Rome, ses Empereurs, ont paru souvent comme fous. Et même au quatorzième siècle, Cola Rienzi, le fils d’une blanchisseuse, devenu tribun de Rome, ne tournait-il pas son épée vers les trois parties du globe, en disant : « Ceci et ceci, cela encore, est à moi ? »
À plus forte raison, le pape se croyait-il le maître du monde. Lorsque Albert d’Autriche se fit empereur par la mort d’Adolphe de Nassau, Boniface, indigné, mit la couronne sur sa tête, saisit une épée, et s’écria : « C’est moi qui suis César, c’est moi qui suis l’empereur, c’est moi qui défendrai les droits de l’Empire. » Au Jubilé