Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 1.djvu/12

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ruines d’un monde, je pus croire un moment que je restais le dernier homme.

Quittant Paris au 2 Décembre, n’emportant d’autre bien que les matériaux de mes derniers volumes, les documents de la Terreur, je l’écrivis près Nantes, en grande solitude, à la porte de la Vendée.

Ainsi, contre vents et marée, à travers tout événement, elle alla cette histoire, elle alla jusqu’au bout, saignante, vivante d’autant plus, une d’âme et d’esprit, sans que les dures traverses du sort l’aient fait dévier de sa ligne première. Les obstacles, bien loin d’arrêter, y aidèrent. Dans une vieille maison transparente que perçaient les grandes pluies, en janvier 1853, j’écrivais sur le même mois correspondant de la Terreur : « Je plonge avec mon sujet dans la nuit et dans l’hiver. Les vents acharnés de tempêtes qui battent mes vitres depuis deux mois sur ces collines de Nantes, accompagnent de leurs voix, tantôt graves, tantôt déchirantes, mon Dies iræ de 1793. Légitimes harmonies ! Je dois les remercier. Ce qu’elles m’ont dit souvent dans leurs fureurs apparentes, dans leurs aigres sifflements, dans le cliquetis sinistrement gai dont la grêle frappait mes fenêtres, c’était la