Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 1.djvu/245

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Ce silence inconcevable tenait sans doute, on l’a dit, à l’anarchie complète qui régnait dans le conseil, tous étant discordants sur tout, sauf un point bien arrêté, la dissolution de l’Assemblée nationale. Il tenait aussi, je le crois, à la méprise de la cour, qui, trop fine et trop subtile, voyait dans ce grand mouvement l’effet d’une petite intrigue, croyait que le Palais-Royal faisait tout et qu’Orléans payait tout… Explication puérile : est-ce qu’on solde des millions d’hommes ? Le duc avait donc aussi payé le soulèvement de Lyon et du Dauphiné, qui, au même moment, proclamaient le refus de l’impôt ? Il avait payé les villes de Bretagne, qui prenaient les armes, payé les soldats qui, à Rennes, refusèrent de tirer sur les bourgeois ?

Le buste du prince, il est vrai, avait été porté en triomphe. Mais le prince lui-même était venu à Versailles se remettre à ses ennemis, protester qu’il avait autant, et plus que personne, peur de cette émeute. On le pria de vouloir bien coucher au château. La cour, l’ayant sous la main, croyant tenir le fabricateur de toute la machination, en eut peu d’inquiétude. Le vieux maréchal, à qui toutes les forces militaires étaient confiées en ce moment, s’enveloppa bien de troupes, tint le roi en sûreté, mit en défense Versailles, à qui personne ne songeait, et laissa les vaines fumées de Paris se dissiper d’elles-mêmes.