Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 1.djvu/300

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Palais-Royal. Pour être quelque peu bègue, il n’était que plus amusant. Les saillies errantes sur sa lèvre embarrassée s’échappaient comme des dards. Il suivait sa verve comique, sans trop s’informer si la tragédie n’allait pas en résulter. Les fameux jugements de la basoche, ces farces judiciaires qui avaient tant amusé l’ancien Palais, n’étaient pas plus gais que les jugements du Palais-Royal[1] ; la différence est que ceux-ci souvent s’exécutaient en Grève.

Chose étrange et qui fait rêver, c’est Desmoulins, ce polisson de génie aux plaisanteries mortelles, c’est ce taureau de Danton qui rugit le meurtre, ce sont eux, dans quatre années, qui périront pour avoir proposé le comité de la clémence !

Mirabeau, Duport, les Lameth, bien d’autres plus modérés, approuvaient les violences ; plusieurs disent qu’ils les conseillaient. Sieyès, en 1788, demandait la mort des ministres. Mirabeau, le 14 juillet, cria : « La tête de Broglie ! » Il logeait chez lui Desmoulins. Il marchait volontiers entre Desmoulins et Danton ; ennuyé de ses Genevois, il aimait bien mieux ceux-ci, faisait écrire l’un, parler l’autre.

Un homme très modéré, très sage, une tête froide, Target, était intimement lié avec Desmoulins et donnait son approbation au pamphlet de la Lanterne.

Ceci mérite explication :

Personne ne croyait à la justice sinon à celle du peuple.

  1. Voir le jugement de Duval d’Espreménil, raconté par C. Desmoulin dans ses lettres.