Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 1.djvu/323

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quinzième siècle, firent un cimetière de notre malheureux pays. Ils voulaient amener les Anglais en France. La chose a été contestée ; pourquoi ? Elle est infiniment vraisemblable, puisqu’elle a été sollicitée plus tard, tentée, manquée, à Quiberon.

Mais, cette fois, il s’agissait non pas d’amener leur flotte sur une plage difficile, sans défense et sans ressources, mais bien de les établir dans une bonne place défendable, de leur mettre en main l’arsenal naval où la France, un siècle durant, a entassé ses millions, ses travaux, tout son effort… La pointe, la proue du grand vaisseau national, l’écueil du vaisseau britannique… Il s’agissait de livrer Brest.

Depuis que la France avait aidé à la délivrance de l’Amérique, divisé l’empire anglais, l’Angleterre souhaitait non son malheur, mais sa ruine et destruction complète, qu’une forte marée d’automne soulevât l’Océan de son lit et couvrît d’une belle nappe tout ce qu’il y a de terre de Calais aux Vosges, aux Pyrénées et aux Alpes.

Cependant il y avait une chose plus belle à voir, c’était que cette mer nouvelle fût de sang, du sang de la France, tiré par elle de ses veines, qu’elle s’égorgeât elle-même et s’arrachât les entrailles.

À cela le complot de Brest était un bon commencement. Seulement il était à craindre que l’Angleterre, donnant la main aux scélérats qui lui vendaient leur pays, n’unît toute la France contre elle, qu’elle ne nous réconciliât dans une indignation commune, qu’il n’y eut plus de partis…