Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 1.djvu/380

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lumières, elle semblait peu sentir la situation. Retardée par les résistances royalistes, aristocratiques, qu’elle portait dans son sein, elle l’était encore par les habitudes de barreau ou d’académie que conservaient ses plus illustres membres, gens de lettres ou avocats.

Il fallait d’abord, à tout prix, sans partage et sans retard, insister et obtenir la sanction des décrets du 4 août, enterrer le monde féodal ; il fallait de ces décrets généraux déduire des lois politiques, et les lois administratives qui détermineraient l’application des premières — c’est-à-dire organiser, armer la Révolution, lui donner la forme et la force, en faire un être vivant. Comme tel, elle devenait moins dangereuse qu’en la laissant flottante, débordée, vague et terrible, comme un élément, comme l’inondation, l’incendie.

Il fallait se hâter surtout. Ce fut pour Paris un coup de foudre, quand on y sut que l’Assemblée s’occupait seulement de savoir si elle reconnaîtrait au roi le droit absolu d’empêcher (veto absolu) ou le droit d’ajourner, suspendre deux ans, quatre ans ou six ans… Pour des maux si pressants, mortels, cette perspective était le désespoir même, une damnation sans appel… Quatre ans, six ans, bon Dieu ! pour des gens qui ne savaient pas s’ils vivraient le lendemain.

Loin d’avancer, l’Assemblée visiblement reculait. Elle fit deux choix rétrogrades et tristement significatifs. Elle nomma président l’évêque de Langres,