Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 1.djvu/47

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dogme nouveau… Il était seul ; le lendemain, le monde entier fut à lui.

Si les amis de la Liberté voient leur nombre décroître, c’est qu’ils l’ont voulu eux-mêmes. Plusieurs se sont fait un système d’épuration progressive, de minutieuse orthodoxie, qui vise à faire d’un parti une secte, une petite église. On rejette ceci, puis cela ; on abonde en restrictions, distinctions, exclusions. On découvre chaque jour quelque nouvelle hérésie.

De grâce, disputons moins sur la lumière du Thabor, comme faisait Byzance assiégée. Mahomet II est aux portes.

De même que, les sectes chrétiennes se multipliant, il y eut des jansénistes, des molinistes, etc., et il n’y eut plus de chrétiens, les sectes de la Révolution annulent la Révolution ; on se refait constituant, girondin, montagnard ; plus de révolutionnaire.

On fait peu de cas de Voltaire, on rejette Mirabeau, on exclut Madame Roland. Danton même n’est pas orthodoxe… Quoi ! il ne restera donc que Robespierre et Saint-Just ?

Sans méconnaître ce qu’il y eut dans ces hommes, sans vouloir les juger encore, qu’il suffise ici d’un mot : Si la Révolution exclut, condamne leurs prédécesseurs, elle exclut précisément ceux qui lui donnèrent prise sur le genre humain, ceux qui firent un moment le monde entier révolutionnaire. Si elle déclare au monde qu’elle s’en tient à ceux-ci, si elle