Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 2.djvu/102

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

projet. Au ministère, aux Jacobins (ce club était à peine ouvert), on travailla en même temps pour rendre Mirabeau impossible. Deux honnêtes gens, Montlosier du côté droit, Lanjuinais du côté gauche, parlèrent dans le même sens. Ils proposèrent et firent décréter « qu’aucun député en fonction, ni trois ans après, ne pût accepter de place ». — Ainsi les royalistes réussirent à interdire le ministère au grand orateur, qui eût été le soutien de leur parti (7 novembre).

La reine, nous l’avons dit, ne voulait pas être sauvée par la Révolution, et elle ne voulait pas l’être non plus par l’émigration, par les princes. Elle avait trop bien connu le comte d’Artois pour ne pas savoir le peu que c’était. Elle se défiait avec raison de Monsieur, comme d’un caractère louche et faux.

Quelles étaient donc ses espérances ? ses vues ? ses secrets conseillers ?

Il ne faut pas compter Mme de Lamballe, jolie[1] petite femme très nulle, amie tendre de la reine, mais sans idées, sans conversation, et qui ne méritait pas la responsabilité terrible que l’on fit peser sur elle. Elle semblait être un centre ; elle tenait avec grâce le véritable salon de Marie-Antoinette, au rez-de-chaussée du pavillon de Flore. Beaucoup

  1. Jolie est le mot propre ; rien de plus loin de la beauté. Des traits forts petits, peu de front, peu de cerveau. « Elle avait les mains un peu grosses », dit Mme de Genlis. Le portrait de Versailles marque très bien la race et le pays ; c’était une gentille Savoyarde. Les cheveux cachés dans la poudre, mais (hélas ! il n’y parut que trop !) abondants, admirables