Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 2.djvu/243

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Il nous faut l’envisager d’un ferme regard, au dehors et au dedans. J’ai suivi la pauvre France, candide et crédule encore, dans l’entraînement trop facile de son cœur, dans ses aveuglements volontaires, involontaires. Je dois faire comme elle fit, en présence de ces dangers imprévus, fouiller plus profondément la réalité, sonder à la fois le péril et les ressources de la résistance.

Le péril, il serait peu à craindre, si la France n’était divisée. Il faut le dire, l’union fut sincère au sublime moment que j’ai eu le bonheur de peindre ; elle fut vraie, mais passagère ; bientôt la division et de classes et d’opinions avait reparu.

Le 18 juillet déjà, quatre jours après la fête, si heureusement passée, lorsqu’on avait tant sujet de se confier au peuple, lorsqu’il eût fallu en maintenir, en fortifier l’union, en présence du danger, Chapelier (quel changement, pour le président du 4 août !), Chapelier propose d’exiger l’uniforme de la garde nationale, c’est-à-dire de la limiter à la classe riche ou aisée, c’est-à-dire de préparer le désarmement des pauvres !… La proposition, il faut le dire, à l’honneur de ce temps, fut mal vue et mal reçue des riches mêmes (sauf la bourgeoisie de Paris et les gens de La Fayette). Barbaroux la blâma à Marseille. La riche Bordeaux la repoussa et protesta que, pour se reconnaître, on pouvait se contenter d’un ruban.

Ces germes de division dans la garde nationale, les défiances qui s’élèvent contre les municipalités, doivent multiplier, fortifier les associations volon-