Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 2.djvu/272

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le voir donnèrent le spectacle le plus ridicule ; ils l’adoraient à la lettre, lui baisaient les mains, Les bottes.

Rien de plus sensible qu’un dieu, de plus irritable ; et la situation elle-même était éminemment irritante. Elle était pleine de contrastes, d’alternatives violentes. Le dieu était obligé, dans les hasards de l’émeute, de se faire commissaire de police, gendarme au besoin : une fois il lui arriva, n’obtenant nulle obéissance, d’arrêter un homme de sa main et de le mener en prison.

La grande et souveraine autorité qui eût encouragé La Fayette et l’eût soutenu dans ces épreuves, était celle de Washington. Elle lui manqua entièrement. Washington était, comme on sait, le chef du parti qui voulait fortifier en Amérique l’unité du gouvernement. Le chef du parti contraire, Jefferson, avait fort encouragé l’élan de notre Révolution. Washington, malgré son extrême discrétion, ne cachait pas à La Fayette son désir qu’il pût enrayer. Les Américains, sauvés par la France et craignant d’être menés par elle trop loin contre les Anglais, avaient trouvé prudent de concentrer leur reconnaissance sur des individus, La Fayette, Louis XVI. Peu comprirent notre situation, beaucoup furent du parti du roi contre la France. Une chose d’ailleurs les refroidit, à quoi nous n’avions point songé, mais qui blessait leur commerce, une décision de l’Assemblée sur les tabacs et les huiles.

Les Américains, si fermes contre l’Angleterre en