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Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 2.djvu/517

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d’un si grand peuple, qui se sentaient, après tout, payés, nourris par la France, ne pouvaient pas aisément se décider à sabrer des gens qui venaient amicalement leur donner des poignées de main et boire avec eux.

Dans ce moment critique, où chaque minute avait une importance infinie, avant que le roi eût pu répondre à Choiseul, entrent à grand bruit la municipalité, les officiers de la garde nationale. Plusieurs se jettent à genoux : « Au nom de Dieu, Sire, ne nous abandonnez pas ; ne quittez pas le royaume. » Le roi tâcha de les calmer : « Ce n’est pas mon intention, Messieurs ; je ne quitte point la France. Les outrages qu’on m’a faits me forçaient de quitter Paris. Je ne vais qu’à Montmédy ; je vous invite à m’y suivre… Faites seulement, je vous prie, que mes voitures soient attelées. »

Ils sortirent. C’était alors la dernière minute qui restait à Louis XVI. Choiseul, Goguelat, attendaient ses ordres. Il était deux heures du matin. Il y avait autour de la maison une foule confuse, mal armée, mal organisée ; la plupart sans armes à feu. Ceux même qui en avaient n’auraient pas tiré sur le roi (Drouet, peut-être, excepté), encore moins sur les enfants. La reine seule eût pu courir un danger réel. C’est à elle que Choiseul et Goguelat s’adressèrent. Ils lui demandèrent si elle voulait monter à cheval et partir avec le roi ; le roi tiendrait le dauphin. Le pont n’était pas praticable ; mais Goguelat connaissait les gués de la petite rivière : entourés