Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 3.djvu/246

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« L’Empereur est un philanthrope, Catherine est philosophe », et autres vaines raisons, accidentelles et personnelles, qui ne changent rien à la nature des choses, aux nécessités profondes de la situation. Ce qu’ils savaient, c’est que la France se trouvait, par sa Révolution, seule de son espèce en ce monde, un miracle, un monstre que l’on regardait avec terreur ; que cette créature nouvelle, entre les rois frémissants de haine et de peur, et les peuples à peine éveillés, se trouvait profondément seule, et devait regarder tout d’abord quelle défense elle avait en soi.

C’est justement ce qu’elle fit. Dès 1789, au moment de sa naissance, elle sauta sur ses armes. Le premier instinct lui dit qu’elle avait un ennemi, quelque chose d’inconnu qui la menaçait ; elle l’appela les brigands et se mit à chercher les brigands de village en village.

En 1790, aux fédérations, dans son armement pacifique, elle commença à rêver la délivrance des peuples, leur fédération générale sur les trônes brisés des rois.

En 1791, elle connut l’entente profonde du roi et des rois de l’Europe. Elle comprit son double danger. Elle arma, à bon escient.

« Car enfin (c’était là le raisonnement, bien simple, mais sans réplique, du dernier des paysans), est-ce que les rois oublieront que nous avons mis la main sur la royauté, arrêté le roi à Varennes ? Est-ce qu’ils ne se sont pas trouvés tous captifs en Louis XVI ?… Le peuple, par toute la terre, est serf et prisonnier