Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 3.djvu/267

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Tout ce qu’on fera maintenant, qu’on le fasse pour mon fils. »

Il jugeait beaucoup mieux que la reine de l’impuissance des constitutionnels, et considérait la constitution de 1791 comme l’anéantissement de la monarchie. Une circonstance d’étiquette, en apparence peu grave, lui représenta sa propre pensée d’une manière si expressive qu’il ne put se contenir ; son cœur déborda. Le jour de l’acceptation de la constitution, 13 septembre 1791, le président (c’était Thouret), se levant pour prononcer son discours et voyant que le roi l’écoutait assis, crut devoir s’asseoir. Thouret était, comme on sait, un homme fort modéré, mais, dans cette grave circonstance qui n’était pas moins qu’une sorte de contrat entre le roi et le peuple, il avait voulu, par ce signe, constater l’égalité des deux parties contractantes.

« Au retour de la séance, dit Mme Campan, la reine salua les dames avec précipitation et rentra fort émue. Le roi arriva chez elle par l’intérieur ; il était pâle, ses traits extrêmement altérés. La reine fit un cri d’étonnement en le voyant ainsi. Je crus qu’il se trouvait mal. Mais quelle fut ma douleur quand je l’entendis s’écrier, en se jetant dans son fauteuil et mettant le mouchoir sur ses yeux : « Tout est perdu… Ah ! Madame ! Et vous avez été témoin de cette humiliation !… Quoi ! vous êtes venue en France pour voir… » Ces paroles étaient coupées par des sanglots. La reine se jeta à genoux devant lui et le serra dans ses bras. — Une