Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 3.djvu/403

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despotisme ; qu’elles y rentrent aujourd’hui au nom de la loi… »

Un frémissement immense suivit le geste admirable par lequel le grand orateur renvoya visiblement l’épouvante au palais de la royauté. Nulle parole de Mirabeau n’avait eu un plus grand effet. C’est qu’ici l’homme était digne de la magistrature terrible qu’il exerçait à la tribune ; le caractère était au niveau du génie même. C’était la voix de l’honneur.

« … Qu’elles y pénètrent les cœurs, ajoute-t-il. Qu’ils sachent bien, ceux qui l’habitent, que la constitution ne rend inviolable que le roi. La loi atteindra les coupables, sans faire nulle distinction. Point de tête criminelle que son glaive ne puisse toucher. »

Ce formidable discours, celui de Brissot, étaient, il faut le dire, des actes de grand courage. Si la Gironde menaçait par les piques et les faubourgs, il faut dire aussi que la vie des Girondins, au milieu des cinq ou six mille bretailleurs ou coupe-jarrets de la nouvelle garde, bien autrement militaire que la tourbe des faubourgs, n’était guère en sûreté. On les voyait, armés de poignards et de pistolets, suivre les séances, remplir les tribunes, les couloirs ; le jour n’était pas bien loin où le poignard royaliste devait frapper Saint-Fargeau.

La parole brisa ici l’épée, le poignard. L’épouvante, comme dit Vergniaud, rentra dans les Tuileries. Delessart fut abandonné. Narbonne ne put se sou-