Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 3.djvu/418

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philosophique, avec les formules de Rousseau, en suivant de près, copiant, adaptant à la circonstance l’évangile philosophique de l’époque, le Vicaire savoyard, que l’ennemi n’attaquerait pas sans péril, et derrière lequel, après tout, Robespierre était toujours à même de trouver sa sûreté. Si la chose réussissait, c’était un vrai coup de maître ; enlever les femmes et les dévotes, pour qui avait les Jacobins, c’était concentrer deux forces jusque-là peu conciliantes ; c’était, au moyen des premières, aller jusqu’au lieu où la Révolution pénétrait si peu encore, au sein des familles, au foyer.

Voici donc ce que Robespierre hasarda aux Jacobins. Dans une adresse sentimentale, nuancée de mysticisme philosophique, il dit entre autres choses : « Qu’il avait été permis à l’homme le plus ferme de désespérer du salut public, lorsque la Providence, qui veille sur nous beaucoup mieux que notre propre sagesse, en frappant Léopold, a déconcerté les projets de nos ennemis. »

Cette forme et autres semblables, peu attaquables en elles-mêmes, mesurées, timides, recevaient beaucoup de clarté de la conduite générale de Robespierre ; elles annonçaient assez que, du pharisaïsme moral, il passerait, au besoin, à l’hypocrisie religieuse. Les indiscrétions de Camille Desmoulins, son enfant perdu, aidaient à comprendre. On le vit, bien peu après, lui voltairien, lui sceptique, approuver les processions dans les rues, reprocher au magistrat de les empêcher, faisant entendre, avec une