ceux qui, tout à l’heure, avaient juré de défendre Robespierre, n’en suivirent pas moins La Fayette. Toute la rue Saint-Honoré se mit aux fenêtres et vit avec grande joie passer aux lumières cette pompeuse comédie d’harmonie et de concorde[1].
Le fameux mot enlèvement, absent de l’adresse des Jacobins, reparaît le lendemain dans celle de l’Assemblée. Le roi avait beau dire dans la protestation qu’il fuyait, l’Assemblée, dans son adresse, soutenait qu’il avait été enlevé. Elle prenait l’engagement de venger la loi (promesse légère, simple phrase éloignée de sa pensée). Elle s’excusait d’avoir parfois gouverné, administré : « C’est que le roi ni les ministres n’avaient pas alors la confiance de la nation. » Le roi l’avait-il regagnée, en allant chercher l’étranger ? La confiance, perdue à ce point, se recouvre-t-elle ?… Ainsi, l’adresse flottait, elle disait trop ici et là trop peu. Elle faisait déjà sentir ce que pouvait être le système faux et boiteux dans lequel on s’engageait, la transaction incertaine d’une Assemblée impopulaire et d’une royauté captive, méprisée, à jamais suspecte, lequel traité, déchiré un jour par la franchise du peuple, brisé d’un accès de colère, risquait de fonder l’anarchie[2].
- ↑ Voir cette scène arrangée (au point de vue de 1828) par Alexandre de Lameth (Histoire de l’Assemblée constituante, I, 427.)
- ↑ Les Lameth appuyaient leur système sur l’alliance des diverses fractions, plus ou moins constitutionnelles, de l’Assemblée. Ils avaient rallié La Fayette, Sieyès ; il leur manquait encore le groupe qu’on appelait Monarchien, Malouet, Clermont-Tonnerre, ces constitutionnels royalistes, qu’eux-mêmes, les Lameth, alors chefs des Jacobins, avaient chassés de club en club, de salle en salle, par la violence du peuple. Il s’agissait maintenant de se