Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 4.djvu/109

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l’arrêtait. Elle se mit à prononcer des jugements sur des individus dans un moment où son opinion exprimée équivalait à la mort. Je ne sais quel individu vient demander à la Commune de décider que M. Duport a perdu la confiance de la nation. Cette décision portée, on verra qu’il fallut à Danton les plus persévérants efforts pour empêcher que le célèbre député de la Constituante, ainsi désigné au massacre, ne fut immolé trois semaines après.

Non contente de fouler aux pieds toute liberté individuelle, elle porta, le 29 août, l’atteinte la plus directe à la liberté de la presse. Elle manda à sa barre, elle poursuivit dans Paris Girey-Dupré, jeune et hardi Girondin, pour un article de journal ; elle alla jusqu’à faire investir le ministère de la guerre, où Girey-Dupré s’était, disait-on, réfugié. L’Assemblée, à son tour, manda à sa barre le président de la Commune, Huguenin, qui ne daigna comparaître. Elle prit alors une résolution naturelle, mais fort périlleuse dans la situation, ce fut de briser la Commune.

Celle-ci se brisait elle-même par son furieux esprit de tyrannie anarchique. Chacun des membres de ce corps étrange affectait la dictature, agissait en maître et seul, sans se soucier d’aucune autorité antérieure, souvent sans consulter la Commune elle-même. Ce n’est pas tout ; chacun de ces dictateurs croyait pouvoir déléguer sa dictature à ses amis. Les affaires les plus délicates, où la vie, la liberté, la fortune des hommes, étaient en jeu, se trouvaient tranchées par