Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 4.djvu/119

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Là pourtant il se trouvait sur le terrain des passions les plus brûlantes ; là il n’y avait guère moyen de s’en tenir aux principes généraux, comme il avait fait à la Constituante, ni aux délations vagues, comme il faisait aux Jacobins. Pour la première fois de sa vie, il lui fallait agir, parler nettement ou bien s’annuler pour toujours. La Commune du 10 août, quelque violente qu’elle fût, comptait pourtant deux partis : les indulgents, les atroces. Se décider pour les premiers, c’était se mettre à la suite de Pétion et de Manuel, laisser à Danton l’avant-garde de la Révolution, probablement l’initiative de la violence. Danton paraissait peu à la Commune ; nulle mesure atroce n’y fut conseillée par lui. Mais la Commune avait pour secrétaire un très ardent dantoniste, qui disait et faisait croire qu’il avait le mot de Danton, je parle du jeune Tallien.

La concurrence de Danton, la crainte de le laisser grandir, pendant que lui diminuait, était sans nul doute la préoccupation de Robespierre. Il y avait là comme une impulsion fatale qui pouvait le mener à tout. Il trouvait, à la Commune et au dehors, parmi les plus avancés, une classe d’hommes spécialement qui l’embarrassait beaucoup, le mettant en demeure de se décider sur-le-champ. Ces exaltés, qui, directement ou indirectement (quelques-uns sans le savoir), poussaient au massacre, étaient, par un contraste étrange, ceux qu’on pouvait appeler les artistes et hommes sensibles. C’étaient des gens nés ivres, si je puis parler ainsi, rhéteurs larmoyants, tous avaient