Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 4.djvu/176

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

demanda compte à Danton du sang qui était versé.

Sauver l’État, ce mot comprenait deux choses : rester à Paris quand même, y rester jusqu’à la mort et y faire rester les autres ; — d’autre part, conserver ou rétablir l’unité des pouvoirs publics, éviter une collision entre les deux pouvoirs qui restaient, l’Assemblée et la Commune.

Lever la main sur la Commune, dans cette crise désespérée, briser le dernier pouvoir qui eût force encore, c’était une opération terrible, où la France agonisante pouvait expirer. D’autre part, laisser faire la Commune, se soumettre, fermer les yeux sur le massacre, c’était s’avilir par cette tolérance forcée, laisser dire qu’on avait peur, qu’on était faible, lâche, infâme et le laquais de Marat.

Restait un troisième parti, celui de l’orgueil, de dire que le massacre était bien, que la Commune avait raison, — ou même de faire entendre qu’on avait voulu le massacre, qu’on l’avait ordonné, que la Commune ne faisait qu’obéir. Ce troisième parti, horriblement effronté, avait ceci de tentant qu’en le prenant, Danton se mettait à l’avant-garde des violents, se subordonnait Marat, écartait les vagues dénonciations dans lesquelles on essayait de l’envelopper.

Il y avait, je l’ai dit, du lion dans cet homme, mais du dogue aussi, du renard aussi. Et celui-ci, à tout prix, conserva la peau du lion.

Que dit-il, la nuit du 2 ? Je ne peux pas croire qu’il ait déjà accepté la pleine responsabilité du