Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 4.djvu/192

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blée, pour les protéger, n’autorisât une prise d’armes qui eût fourni aux royalistes un prétexte de se relever. La Commune envoya à l’Assemblée, envoya au Temple. Les commissaires prirent un moyen ingénieux de garantir le Temple, en évitant toute chance de collision ; ce fut d’entourer le mur d’un simple ruban tricolore… Quelque affreux que fût ce moment, ils savaient parfaitement que la grande masse du peuple respecterait le ruban et le ferait respecter ; plusieurs, en effet, dit-on, le baisèrent avec enthousiasme. Il n’était nullement à craindre que les égorgeurs hasardassent de le forcer ; ils ne le voulaient pas eux-mêmes ; ils demandaient seulement à circuler sous les fenêtres de la famille royale, à se faire voir de la reine. On n’osa les refuser ; on invita même le roi à se mettre à la fenêtre au moment où la tête livide, avec tous ses longs cheveux, venait branlante sur la pique et s’exhaussait à la hauteur des croisées. Un des commissaires, par humanité, se jeta devant le roi, mais il ne put l’empêcher de voir et de reconnaître… Le roi arrêta la reine qui s’élançait et lui épargna l’épouvantable vision.

La promenade continua par tout Paris sans que nul y mît obstacle. On porta la tête au Palais-Royal, et le duc d’Orléans, qui était à table, fut obligé de se lever, de venir au balcon, de saluer les assassins. C’était une amie de la reine, une ennemie par conséquent, qu’il voyait dans Mme  de Lamballe. Il y vit aussi l’avenir et ce que lui-même il devait