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Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 5.djvu/287

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Les marches de l’échafaud étaient extrêmement raides. Le roi s’appuya sur le prêtre. Arrivé à la dernière marche, il échappa, pour ainsi dire, à son confesseur, courut à l’autre bout. Il était fort rouge ; il regarda la place, attendant que les tambours cessassent un moment de battre. Des voix criaient aux bourreaux : « Faites votre devoir. » Ils le saisirent à quatre, mais pendant qu’on lui mettait les sangles, il poussa un cri terrible.

Le corps, placé dans une manne, fut porté au cimetière de la Madeleine, jeté dans la chaux. Mais déjà, sur l’échafaud, des soldats et autres, soit outrage, soit vénération, avaient trempé leurs armes, du papier, du linge, dans le sang qui était resté. Des Anglais achetaient ces reliques du nouveau martyr.

Il y avait eu à peine sur le passage quelques faibles voix de femmes qui avaient osé crier grâce, mais, après l’exécution, il y eut chez beaucoup de gens un violent mouvement de douleur. Une femme se jeta dans la Seine, un perruquier se coupa la gorge, un libraire devint fou, un ancien officier mourut de saisissement. On put voir cette chose fatale que la royauté morte sous le déguisement de Varennes, avilie par l’égoïsme de Louis XVI au 10 août, venait de ressusciter par la force de la pitié et par la vertu du sang.

Le lundi matin, à l’ouverture de la séance, l’exécution faite à peine et le sang fumant encore, une lettre vint à la Convention, terrible dans sa simpli-