Aller au contenu

Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 6.djvu/111

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’insurrection brutale. Ils avaient vu volontiers la force insurrectionnelle passer aux partisans de l’insurrection morale, aux politiques, aux Jacobins. Ils les supposaient assez sages pour garder des ménagements envers l’Assemblée, pour redouter la guerre civile, infaillible résultat d’une violation directe des libertés de la Convention.

Ils le croyaient, ils se trompaient… À ce mot de Bonconseil, on vit que tout était perdu…

« Mandons l’homme de Bonconseil », criaient plusieurs membres. Ordre embarrassant pour les Jacobins. S’il eut paru, ce capitaine, on eût aisément remonté par lui et à Henriot et à Lhuillier, chef ordinaire de Bonconseil, qui, de plus, ce jour du 2 juin, maître absolu de la Commune, donnait l’ordre à Henriot, à toute la force armée.

Barère s’élance à la tribune, brisé, défait, pâle : « Prouvons que nous sommes libres, dit-il d’une voix éteinte. Allons délibérer au milieu de la force armée ; elle protégera sans doute la Convention… »

Quelle était l’intention du personnage à double face ? Crut-il que décidément les Jacobins étaient vainqueurs et voulut-il les regagner en rompant brusquement l’enquête qui allait montrer la main jacobine ? On peut le croire. Peut-être aussi, connaissant les dispositions de la garde nationale très favorables à la Convention, il pensa que, si l’Assemblée perçait jusqu’à elle, elle était sauvée. Quelque parti qui triomphât, Barère pouvait toujours dire qu’il avait aidé au triomphe et s’associer aux vainqueurs.