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Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 6.djvu/305

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lutionnaire, il restait sensible. « Ma chère amie, disait-il à une femme dont il bouleversait la maison et arrêtait le mari, mettez la main sur mon cœur et vous sentirez ce qu’il souffre… Mais un républicain doit obéir au devoir, étouffer la nature. »

Quand ses fonctions d’officier municipal lui donnaient occasion d’entrer chez des religieuses, il s’attendrissait : « Mes chères filles, disait-il avec épanchement, avez-vous quelque peine ? Ne me déguisez rien. Je suis votre père spirituel… Votre recueillement me touche, votre modestie m’enchante… Que je serais heureux d’épouser une vierge de ce monastère ! » Alors tombant à genoux, il baisait la terre et levait les mains au ciel.

Fut-il chrétien ? Rien ne l’indique, quoi qu’on ait imaginé. Après le 21 janvier, il lui arriva au club de déployer un tableau de Jésus-Christ et de dire : « Ce n’est pas assez que le tyran des corps ait péri ; il faut détruire aussi le tyran des âmes. » Il déchira le tableau et il en foula les morceaux aux pieds.

Avec toute sa violence, il était né humain et tendre. Au milieu de ses attaques contre les riches, il lui arriva tout à coup de réclamer pour eux ; il voudrait les sauver aussi : « Les aristocrates ne sont incorrigibles que parce que nous les négligeons trop… On parle de les guillotiner ; c’est bientôt fait… Mais y a-t-il du bon sens à jeter le malade par la fenêtre pour s’exempter de le guérir[1] ? »

  1. « Riches insouciants qui ronflez sur l’ouate, réveillez-vous, secouez vos pavots !… La trompette sonne ; aux armes !… Point de paresse, point de pol-