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Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 6.djvu/387

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du Comité de sûreté générale, Bazire, de la Côte-d’Or, l’une des plus riches natures qu’il y ait eu dans la Convention, jeune homme ardent et généreux, véhément, violent, et qui a donné à la Révolution plusieurs mots sublimes par lesquels elle vit dans les cœurs. Bazire en quelques mois s’était brisé. Entre lui et la mort il n’y avait plus rien. Il était devenu l’enclume sur laquelle tout frappeur novice venait frapper aux Jacobins, s’exercer, montrer sa vigueur. Le texte obligé des attaques quotidiennes, c’était Bazire, l’indulgence de Bazire, la faiblesse de Bazire, les femmes obligées par Bazire, etc.

L’infortuné se décela en juin, lorsqu’on guillotina les dames Desilles, qui avaient caché La Rouerie ; confidentes du complot terrible qui enveloppa la Bretagne, on ne pouvait pas les sauver. Elles étaient fort touchantes ; filles dociles, épouses soumises, elles n’avaient guère fait qu’obéir. Bazire, le cœur percé, se hasarda à demander un sursis, « pour qu’elles fissent des révélations », trois jours au moins. Et il n’y gagna rien qu’un mot amer de Robespierre qui notait sa faiblesse. Dès lors, on eut les yeux sur lui.

On découvrit bientôt qu’il avait rassuré Barnave, alors retiré à Grenoble et très inquiet de son sort. Cette fatale réputation d’indulgence lui fit d’autres affaires très dangereuses. Les femmes, dès qu’elles entrevirent de ce côté quelque lueur, se précipitèrent, assiégèrent le Comité de sûreté générale,