Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 7.djvu/177

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

la Commune ? À Danton, qui se trouve dès lors le seul centre d’opposition. Tous les représentants en mission, les hébertistes aussi bien que les autres, vont maintenant se tourner vers lui.

« Qui sait si cette forte ligue, entraînant la Convention, ne renversera pas les situations, n’échangera pas les rôles, mettant les accusateurs au rang d’accusés ? N’a-t-on pas entendu Tallien, menaçant ceux qui le menacent, crier que la conspiration est plus grande encore qu’on ne croit, qu’il la voit aux Jacobins, qu’elle vise à la dictature ?… Qu’adviendra-t-il, si ces choses, bien reçues de la Convention qui l’en a récompensé en le faisant président, retentissaient tout à coup par le tonnerre de Danton, par les échos des prisons, par les deux cent mille suspects ?… La République elle-même ne s’écroulerait-elle pas ? »

C’est certainement ce que Billaud et Saint-Just dirent dans la nuit du 24. Robespierre, accablé et ne sachant que répondre, leur abandonna la vie du seul homme qu’il eût à craindre. Il s’immola, se dévoua, sacrifia ses souvenirs, tant d’années de travaux communs. Mais il n’eut pas le cœur d’égorger de sa main Danton. Tristement il tira de sa poche la minute, fort travaillée (elle existe) de l’acte d’accusation, et il la passa à Saint-Just. Celui-ci, d’une foi atroce, avec son furieux talent, a tout couvert au hasard d’une blanche écume de rage, ne sachant rien, n’ayant pris nulle information et n’en voulant prendre.