Les représentants revenus de mission ne resteront plus sous le poids de vagues accusations. Ce compte rendu finira tout. »
La chose, appuyée de Couthon, fut décrétée à l’instant même. S’échauffant alors à froid, les deux acteurs protestèrent qu’on avait tort de parler de dictateurs et de décemvirs : « Nous, dictateurs ! » dit Couthon. Et alors, tous les deux levant leur bras débile, le vieillard et le podagre jurèrent que, si jamais il s’élevait un dictateur, il ne mourrait que de leur main.
Mais là ils eurent infiniment plus de succès qu’ils ne le voulaient. La Convention, si morte jusqu’à ce moment, tout à coup vivante et ressuscitée, se leva comme un seul homme, jura, d’une voix de tonnerre, qu’en effet le dictateur serait poignardé. Cette scène eut tout l’effet d’une répétition préalable du drame de Thermidor.
Robespierre visait-il à la dictature ? Vaine question désormais. Quelque peu qu’il l’eût désirée jusque-là, elle lui devenait indispensable dans la terrible situation où il s’était mis. Elle était son seul asile, sa nécessité, sa fatalité. Il y était poussé et par son propre danger et par l’exigence de son parti.
En un mois ou six semaines, comme on le verra, il se trouva nanti de tout instrument de pouvoir. Mais cela n’était rien pour lui. Il voulait le pouvoir moral. Et ce violent cri de l’Assemblée, qui semblait venir à lui de l’échafaud de Danton, que voulait-il dire ? « Jamais ! »