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Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 7.djvu/364

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neur de jeux ! Faire marcher de front ces trois rôles, et sous ce blême visage de censeur impitoyable !… Shakespeare était humilié, Molière vaincu ; Talma, Garrick, n’étaient plus rien à côté.

Mais quand, en même temps, on réfléchit au lâche égoïsme qui lançait en avant les siens et qui les abandonnait ! à la prudence infinie de ce messie, de ce sauveur, qui ne sauvait que lui-même, laissant ses apôtres à Judas, avec Marie-Madeleine, pour être en croix à sa place !… oh ! la fureur du mépris débordait de toutes les âmes !

Hier, dictateur, pape et dieu… l’infortuné Robespierre aujourd’hui roulait au ruisseau.

Telle fut l’acre, brûlante et rapide impression de la calomnie sur des âmes bien préparées. Il avait, toute sa vie, usé d’accusations vagues et trop souvent fausses. Il semblait que la calomnie, lancée si souvent par lui, lui revenait au dernier jour par ce noir flot de boue sanglante…

Les colporteurs au matin, de clameurs épouvantables, hurlant la sainte guillotine, les cinquante-quatre en manteaux rouges, les assassins de Robespierre, aboyaient plus haut encore les Mystères de la Mère de Dieu. Une nuée de petits pamphlets, millions de mouches piquantes nées de l’heure d’orage, volaient sous ce titre. Ces colporteurs, maratistes, hébertistes, regrettant toujours leurs patrons, poussaient par des cris infernaux la publicité monstrueuse du rapport déjà imprimé par décret à cinquante mille.

On ne les laissait pas tranquilles. Mais rien n’y