Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 7.djvu/434

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la France non plus. Ils agirent sans Robespierre, malgré lui, et le perdirent.

Le soir, pendant que Robespierre lisait son discours aux Jacobins et les attendrissait de son péril, Henriot avait déjà l’autorisation de la Commune et distribuait par ses officiers à sa garde nationale triée l’ordre de prendre les armes pour le matin à sept heures.

Robespierre, après sa lecture, dit : « C’est mon testament de mort… Je vous laisse ma mémoire, vous la défendrez… S’il me faut boire la ciguë, vous me verrez calme… — Je la boirai avec toi, s’écria David. — Tous ! tous ! » Ce cri partit de toute la salle, avec des larmes et des sanglots.

Payan, Coffinhal et les autres étaient là brûlants, inquiets, ne sachant encore s’ils tireraient de la bouche de leur maître quelque parole qui semblât une approbation de leurs démarches imprudentes. Une tradition, propagée sans doute par les ennemis de Robespierre, veut qu’un mot lui soit échappé : « Eh bien, essayez encore ! Délivrez la Convention, comme vous le fîtes au 2 juin. Séparez les méchants des faibles ! » Telle eût été l’autorisation, certainement faible et indirecte, que le parti déjà lancé en eût tirée pour la révolte.

Collot, Billaud, étaient mêlés dans la foule ; on les reconnut, on les conspua. Collot essaya en vain de se faire entendre, il arracha son gilet pour montrer la meurtrissure des coups de Ladmiral ; d’ironiques huées l’accablèrent. Les couteaux se levaient sur