Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 7.djvu/499

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publique, leur fureur féroce osait se montrer. Les femmes surtout offraient un spectacle intolérable. Impudentes, demi-nues sous prétexte de juillet, la gorge chargée de fleurs, accoudées sur le velours, penchées à mi-corps sur la rue Saint-Honoré, avec les hommes derrière, elles criaient d’une voix aigre : « À mort ! à la guillotine ! » Elles reprirent ce jour-là hardiment les grandes toilettes, et le soir elles soupèrent. Personne ne se contraignait plus. De Sade sortit de prison le 10 thermidor.

Les gendarmes de l’échafaud, qui, la veille, dans le faubourg, sous les ordres d’Henriot, dispersaient à coups de sabre ceux qui criaient : « Grâce ! » aujourd’hui faisaient leur cour à la nouvelle puissance, et de la pointe du sabre sous le menton des condamnés, les montraient aux curieux : « Le voilà, ce fameux Couthon ! le voilà, ce Robespierre ! »

Rien ne leur fut épargné. Arrivés à l’Assomption, devant la maison Duplay, les acteurs donnèrent une scène. Des furies dansaient en rond. Un enfant était là à point, avec un seau de sang de bœuf ; d’un balai, il jeta des gouttes de sang contre la maison. Robespierre ferma les yeux. Le soir, ces mêmes bacchantes coururent à Sainte-Pélagie, où était la mère Duplay, criant qu’elles étaient les veuves des victimes de Robespierre. Elles se firent ouvrir les portes par les geôliers effrayés, étranglèrent la vieille femme et la pendirent à la tringle de ses rideaux,