Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 1.djvu/169

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

la Noblesse, petite dans le Clergé ; un grand nombre de curés voulaient se réunir au Tiers.

Le Tiers, fort de son grand nombre et maître de la grande salle, déclare qu’il attend les deux autres ordres. Le vide de cet immense local semblait accuser leur absence ; la salle elle-même parlait.

La question de la réunion des ordres contenait toutes les autres. Celui du Tiers, déjà double de nombre, devait y gagner la voix de cinquante nobles environ et d’une centaine de curés, partant dominer les deux ordres d’une majorité énorme, et se trouver en tout leur juge. Le privilège jugé par ceux contre qui il fut établi ! Il était facile de prévoir l’arrêt.

Donc le Tiers attendait le Clergé et la Noblesse ; il attendait dans sa force, patiemment, comme toute chose éternelle. Les privilégiés s’agitaient ; ils se retournaient, trop tard, vers le grand privilégié, le roi, leur centre naturel, qu’ils avaient ébranlé eux-mêmes. Ainsi, dans ce moment d’attente qui dura un mois et plus, les choses se classèrent selon leurs affinités : les privilégiés avec le roi, l’assemblée avec le peuple.

Elle vivait avec lui, parlait avec lui, les portes toutes grandes ouvertes ; nulle barrière encore. Paris siégeait à Versailles, pêle-mêle avec les députés. Une communication continuelle existait sur toute la route. L’assemblée des électeurs de Paris, l’assemblée irrégulière, tumultueuse, que la foule tenait au Palais-Royal, demandaient de moment en moment nouvelle des députés ; on interrogeait avidement tout ce qui