Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 1.djvu/43

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de l’étranger, quoique le cheval anglais batte insolemment la plaine… un grand souffle la parcourt que vous ne sentez nulle part, une âme, un tout-puissant esprit…

Et si cette plaine est aride, et si cette herbe est séchée, elle reverdira un jour.

Car dans cette terre est mêlée profondément la sueur féconde de ceux qui, dans un jour sacré, ont soulevé ces collines, le jour où, réveillées au canon de la Bastille, vinrent, du Nord et du Midi, s’embrasser la France et la France, — le jour où trois millions d’hommes, levés comme un homme, armés, décrétèrent la paix éternelle.

Ah ! pauvre Révolution, si confiante à ton premier jour, tu avais convié le monde à l’amour et à la paix… « Ô mes ennemis, disais-tu, il n’y a plus d’ennemis ! » Tu tendis la main à tous, leur offris ta coupe à boire à la paix des nations… Mais ils ne l’ont pas voulu.

Et lors même qu’ils sont venus pour la frapper par surprise, l’épée que la France a tirée, ce fut l’épée de la paix. C’est pour délivrer les peuples, pour leur donner la vraie paix, la Liberté, qu’elle frappa les tyrans. Dante assigne pour fondateur aux portes de l’enfer l’Amour éternel. Ainsi, sur son drapeau de guerre, la Révolution écrivit : La Paix.

Ses héros, ses invincibles, furent, entre tous, les pacifiques. Les Hoche, les Marceau, les Desaix et les Kléber sont pleurés, comme les hommes de la paix, des amis et des ennemis, pleurés du Nil et du