Page:Michelet - OC, Histoire de la Révolution française, t. 5.djvu/58

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au reste dans cette sombre mêlée d’une affreuse nuit de combat) demandait, avant toute chose, la grandeur de cœur, qui élève aussi la pensée. Les larges et bienfaisantes mesures qui de bonne heure auraient calmé les âmes, emporté d’emblée la Révolution en lui rendant inutiles la plupart des violences, elles ne pouvaient être inspirées que par une qualité absolument étrangère au caractère jacobin, quelle ? La bonté héroïque.

La lutte les absorba ; lutteurs acharnés, ils se prirent successivement aux obstacles, les minèrent, les frappèrent d’en bas. Il fallait les dominer, et frapper d’en haut. Frapper ? Non, enlever le monde du haut de la Fraternité.

Ils eurent la foi, sans nul doute. Mais cette foi ne fut ni aimante ni inspirée. Ils furent les ardents avocats, les procureurs acharnés de la Révolution. Elle demandait d’abord des apôtres et des prophètes.

Qui niera, avec tout cela, les services immenses qu’ils ont rendus à la patrie ? Leur surveillance inquiète des actes de l’Assemblée, leur regard défiant sur les hommes politiques, leur rejet sévère des faibles et des tièdes, donnèrent à la Révolution un nerf incroyable. Ce qui les honore encore plus, c’est qu’à peine sortis de l’Ancien-Régime, souvent corrompus eux-mêmes, en haine de la corruption royaliste, ils voulurent des mœurs. Ils firent des efforts sérieux pour se réformer, réformer les autres. Noble effort, qui, avec leur patriotisme ardent et