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HISTOIRE DU DIX-NEUVIÈME SIÈCLE

Le 10 août (23 thermidor), l’Assemblée fêta, fît fêter dans toutes les communes de France et dans toutes les armées le renversement de la royauté et la prise des Tuileries. Les représentants royalistes, les administrations douteuses prirent part à cette fête et firent acte d’hypocrisie.

Le 4 août Louvet, le 20 août Legendre, se posèrent fort nettement du côté de la Montagne, loin des Girondins trop muets. Ils dirent que, si les émigrés, qui rentraient en foule, ne trouvaient leur tombeau en France, elle deviendrait elle-même le tombeau de la République. Toute l’Assemblée les applaudit et se leva en criant : « Elle sera le tombeau des émigrés ! »

La Convention réfléchissait, et sentait que, contre ces furieux revenants, elle n’avait d’appui, de refuge, que la révolution même, les montagnards si maltraites en prairial, et même les jacobins, les patriotes de toute nuance. Ceux qu’on avait incarcérés, dans leur immuable foi révolutionnaire, pouvaient oublier, devenir pour l’Assemblée une réserve énergique.

En un mois la Convention prit sous ce rapport une couleur plus nette. Le 29 juillet, une section royaliste étant venu isolemment l’accuser à ce sujet, et les Comités se taisant, Legendre éclata, demanda si ces Comités étaient une baie de Quiberon, pleine d’ennemis de l’Assemblée. Dubois-Crancé, avec une violence militaire, foudroya les pétitionnaires de tout le poids de la victoire de Quiberon, qu’on apprenait à l’heure même, et les appela : « Brigands ! »