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parlementaires, lui ferma la porte. Un Capucin, venu aussi, au premier mot de Louise, cria : « Silence, diable maudit ! »

Gauffridi cependant était arrivé à la Sainte-Baume, où il faisait triste figure. Homme d’esprit, mais faible et coupable, il ne pressentait que trop la fin d’une pareille tragédie populaire, et, dans sa cruelle catastrophe, il se voyait abandonné, trahi de l’enfant qu’il aimait. Il s’abandonna lui-même, et, quand on le mit en face de Louise, elle apparut comme un juge, un de ces vieux juges d’Église, cruels et subtils scolastiques. Elle lui posa les questions de doctrine, et à tout il répondait oui, lui accordant même les choses les plus contestables, par exemple, « que le Diable peut être cru en justice sur sa parole et son serment ».

Cela ne dura que huit jours (du 1er  au 8 janvier). Le clergé de Marseille le réclama. Ses amis les Capucins dirent avoir visité sa chambre et n’avoir rien trouvé de magique. Quatre chanoines de Marseille vinrent d’autorité le prendre et le ramenèrent chez lui.

Gauffridi était bien bas. Mais ses adversaires n’étaient pas bien haut. Même les deux inquisiteurs, Michaëlis et le Flamand, étaient honteusement en discorde. La partialité du second pour Louise, du premier pour Madeleine, dépassa les paroles même, et l’on en vint aux voies de fait. Ce chaos d’accusations, de sermons, de révélations, que le Diable avait dictées par la bouche de Louise, le Flamand, qui l’avait écrit, soutenait que tout cela était parole de Dieu, et craignait qu’on n’y touchât. Il avouait une grande défiance de son chef