Page:Michelet - OC, Légendes démocratiques du Nord, La Sorcière.djvu/638

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Et il y a longtemps que je n’ai rien vu qu’à demi (il veut dire, à la grille du parloir). Je vous fatiguerai ? Eh bien, ne me fatiguez-vous pas aussi ? » etc.

Lettre étrange en tous les sens. Il se défie à la fois et de l’évêque, et du Jésuite même, de son collègue, le vieux Sabatier. C’est au fond la lettre d’un coupable inquiet. Il sait bien qu’elle a en main ses lettres, ses papiers, enfin de quoi le perdre.

Les deux jeunes gens répondent au nom de leur sœur par une lettre vive, la seule qui ait un accent vrai. Ils répondent ligne par ligne, sans outrage, mais avec une âpreté souvent ironique où l’on sent l’indignation contenue. Leur sœur y promet de lui obéir, de ne rien dire à l’évêque ni au jésuite. Elle le félicite d’avoir « tant de courage, pour exhorter les autres à souffrir ». Elle relève, lui renvoie sa choquante galanterie, mais d’une manière choquante (on sent là une main d’homme, la main des deux étourdis).

Le surlendemain, ils allèrent lui dire qu’elle voulait sur-le-champ sortir du couvent. Il en fut très effrayé. Il pensa que les papiers allaient échapper avec elle. Sa terreur fut si profonde qu’elle lui ôtait l’esprit. Il faiblit jusqu’à aller pleurer au parloir d’Ollioules, se mit à genoux devant elle, demanda si elle aurait le courage de le quitter (p. 7). Cela toucha la pauvre fille, qui lui dit non, s’avança et se laissa embrasser. Et le Judas ne voulait rien que la tromper, et gagner quelques jours, le temps de se faire appuyer d’en haut.

Le 29, tout est changé. La Cadière reste à Ollioules, lui demande excuse, lui promet soumission (p. 339). Il est trop visible que celui-ci a fait agir