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LES FEMMES DE LA RÉVOLUTION

montrait que le bon temps était tout à fait revenu : « Oui, dit-elle tristement ; mais ce n’est pas là l’odeur de Versailles. »

Voilà le monde sale, infect, obscur, de jouissances honteuses, où s’était réfugiée une foule d’hommes, les uns contre-révolutionnaires, les autres désormais sans parti, dégoûtés, ennuyés, brisés par les événements, n’ayant plus ni cœur ni idée. Ceux-là étaient déterminés à se créer un alibi dans le jeu et dans les femmes, pendant tout ce temps d’orage. Ils s’enveloppaient là-dedans, bien décidés à ne penser plus. Le peuple mourait de faim et l’armée de froid ; que leur importait ? Ennemis de la Révolution qui les appelait au sacrifice, ils avaient l’air de lui dire « Nous sommes dans ta caverne tu peux nous manger un à un, moi demain, lui aujourd’hui… Pour cela d’accord ; mais pour faire de nous des hommes, pour réveiller notre cœur, pour nous rendre généreux, sensibles aux souffrances infinies du monde… pour cela, nous t’en délions. »

Nous avons plongé ici au plus bas de l’égoïsme, ouvert la sentine, regardé l’égout… Assez, détournons la tête.

Et sachons bien, toutefois, que nous n’en sommes pas quittes. Si nous nous élevons au-dessus, c’est par transitions insensibles. Des maisons de filles aux maisons de jeux, alors innombrables, peu de différence, les jeux étant tenus généralement par des dames équivoques. Les salons d’actrices arrivent au-dessus, et de niveau, tout à côté, ceux de telles femmes de lettres, telles intrigantes politiques. Triste échelle où l’élévation n’est pas amélioration. Le plus