Page:Michelet - Quinet - Des jésuites, 1843.djvu/174

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est beau de voir ce dernier des croisés, proclamer en face du calvaire, que les armes seules ne peuvent plus rien pour ressaisir les croyants ; dès ce jour, son plan est fait, son système préparé, sa volonté arrêtée. Il ne sait rien, à peine lire et écrire ; en peu d’années il saura tout ce qu’enseignent les docteurs. Et voilà en effet le soldat, l’invalide amputé, qui abandonne les projets imaginaires, les voluptés de l’ascétisme pour prendre sa place au milieu des enfants, dans les écoles élémentaires de Barcelone et de Salamanque. Le chevalier de la cour de Ferdinand, l’anachorète des rochers de Manrèze, le libre pèlerin du mont Thabor courbe son esprit apocalyptique, sur la grammaire ! Que fait-il, cet homme auquel les cieux sont ouverts ? il apprend les conjugaisons, il épèle le latin. Ce prodigieux empire sur soi-même, au milieu des illuminations divines, marque déjà une époque toute nouvelle.

Cependant, l’homme du désert reparaît encore dans l’écolier. Il guérit, dit-on, les morts, il exorcise les esprits ; il n’est pas si bien redevenu enfant, que le Saint n’éclate par intervalles. D’ailleurs, il professe on ne sait quelle théologie, que personne ne lui a enseignée et qui commence à scandaliser l’inquisition. On le met en prison ; il en sort à la condition de ne plus