Page:Michelet - Quinet - Des jésuites, 1843.djvu/221

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Paul, ont montré à Rome, au milieu de son ivresse, est le calice du Calvaire, avec le fiel et l’hysope du Golgotha ; et c’est aussi pourquoi ils ont vaincu. Quel besoin Rome avait-elle d’un Dieu revêtu d’or et de puissance ? Cette image de la force lui avait apparu cent fois ; mais être la maîtresse du monde, nager dans les richesses de l’Orient, et rencontrer un dieu nu, flagellé qui prétend la gagner par la croix de l’esclave, voilà quelque chose qui l’étonne, la saisit et finit par la subjuguer.

Imaginez qu’au lieu de cela, les apôtres, les missionnaires de Judée eussent tenté de gagner le monde par surprise, de s’accommoder avec lui, de ne lui montrer de l’Evangile que la partie analogue au paganisme, qu’ils eussent caché le Calvaire et le sépulcre aux voluptueux de la Grèce et de Rome, qu’au lieu de livrer à la terre la parole dans son intégrité, ils n’eussent laissé voir que ce qui devait plaire à la terre ; en un mot, imaginez que les apôtres dans leurs missions eussent tenu la même politique que les missionnaires de la société de Jésus, je dis qu’ils eussent eu dans leurs entreprises auprès du monde romain la même issue que les jésuites auprès du monde oriental : à savoir, qu’après un succès d’un moment, obtenu par surprise, ils eussent été bientôt rejetés et extirpés de la société à