Page:Michelet - Quinet - Des jésuites, 1843.djvu/226

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ils suivent avec lui le cours des fleuves mystérieux ; ils sèment encore là l’Evangile, et, encore une fois, un vent de colère disperse cette semence, avant qu’elle ait pu germer. Le génie de la société marche en secret derrière chacun de ces missionnaires, et stérilise le sol à mesure qu’ils le cultivent. Après un moment d’espérance, tout disparaît, emporté on ne sait par quelle puissance. L’époque heureuse de cette chrétienté sauvage est du milieu du dix-septième siècle ; déjà en 1722, le père Charlevoix vient suivre les traces de ces missions de la société de Jésus. Il en retrouve à peine quelques vestiges ; et ces défenseurs du catholicisme se trouvent encore une fois n’avoir travaillé que pour leurs ennemis ; et ces prétendus apôtres de la papauté ont aussi frayé le chemin au protestantisme qui les enveloppe avant qu’ils l’aperçoivent. En sortant des forêts profondes, où ils ont lutté de stratagèmes avec l’Indien, ils croient avoir bâti pour Rome, ils ont bâti pour les États-Unis ; encore une fois, dans la grande politique de la providence, la ruse s’est retournée contre la ruse.

Cependant, il a été donné à la Société de Jésus de réaliser une fois, sur un peuple, l’idéal de ses doctrines ; pendant une durée de cent cinquante ans, elle est parvenue à faire passer tout entier son principe