Page:Michiels - Études sur l'Allemagne, renfermant Une histoire de la peinture allemande, 1845.djvu/287

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Ils sortirent donc; mais le protégé de Charles devenait de plus en plus faible, de plus en plus pâle. Sentant la nuit obscurcir ses yeux, il se coucha sous un arbuste et dormit à peu près deux heures. Que j’aurais voulu te voir durant ce triste sommeil, ô pauvre grand homme ! que j’aurais voulu m’asseoir à tes côtés, sur les racines d’un hêtre, et là, t’environnant d’amour, fléchir pour toi l’injuste courroux du sort! Hélas! l’univers était-il donc insensible, que toi, son charme et sa parure, tu fusses ainsi livré sans protection à toutes les douleurs. Ah! les vents auraient dû se (aire, le bois étouffer ses soupirs, les oiseaux leur plainte mélodieuse, et l’Allemagne attendre en silence le réveil de son plus beau génie. Mais tu n’obtins pas même l’attention qu’on donne aux âmes vulgaires; un passant troubla ton repos, ce repos bienfaisant qui te rendait la vie. Pas plus que les autres, tu ne pouvais échapper à ta destinée ; lu devais aussi lutter contre la nature et les hommes, car ils injurient sans relâche, ils attaquent sans pitié la grandeur morale, afin qu’elle prouve sa puissance par leur défaite et que les bien-aimés du ciel n’empruntent rien à la terre. Un peu soulagé de ses fatigues, Schiller continua son voyage, et ils atteignirent bientôt Francfort. Après avoir réglé le prix de leurs dépenses avec rhôle, pour savoir combien de temps durerait leur mince fortune, le poète écrivit au baron